CONSOMMATION D'ENERGIE et EMISSIONS de CO2
DANS LE NORD-PAS-DE-CALAIS AUJOURD’HUI
par Jacqueline Istas
Avec une consommation d’énergie finale de 14 389 ktep (1 ;2 ), le Nord-Pas-de-Calais est une des régions les plus consommatrices d’énergie de France. Sa forte densité démographique n’en est pas la seule cause. Sa consommation énergétique s’élève en effet à 9% de la consommation nationale , alors que l’ensemble de ses habitants représentent 6, 6% de la population française.
Les
activités consommatrices se répartissent ainsi (3) :
Agriculture | 1% |
Tertiaire | 10% |
Résidentiel | 18,7% |
Sidérurgie | 23,3% |
Autres industries | 26,6% |
Transports | 20,4% |
L’importance de l’industrie, notamment de la sidérurgie, dans la consommation d’énergie finale du Nord-Pas-de-Calais est plus de deux fois supérieure à la moyenne nationale : 49,9% contre 23, 7% en 2001 (3).
Les formes d’énergie utilisées se répartissent de façon inégale (3) :
Electricité d’origines diverses : nucléaire, centrales thermiques, éolien… |
18,9% |
Energies renouvelables hors électricité : bois… | 1,9% |
Gaz | 25,7% |
Produits pétroliers | 31,4% |
Combustibles minéraux solides : charbon, coke de houille |
22,1% |
Au moment où émerge le projet de nouveau programme nucléaire
pour la production d’électricité, notons que l’électricité
représente moins de 19% de l’énergie finale consommée
dans la région. Ce sont les produits pétroliers, ressource non
renouvelable et bientôt épuisée, qui en représentent
la forme d’énergie la plus consommée. Or les deux tiers
de ceux-ci sont utilisés dans les transports, notamment dans les transports
routiers.
Dans tous les secteurs, la consommation régionale d’énergie a progressé entre 1990 et 2001 : de 28,8% dans les transports, de 25,5% dans le tertiaire, de 12% dans le résidentiel, de 8% dans la sidérurgie et de 11,2% dans le reste de l’industrie (3).
La consommation de produits pétroliers a été
augmentée par l’accroissement du trafic routier, celui-ci étant
dû en particulier à l’étalement urbain et à
l’explosion des transports de marchandises.
L’étalement urbain contribue en effet à l’accroissement
des déplacements de personnes en voitures individuelles. Ainsi , la consommation
énergétique a augmenté de 30% dans la zone périurbaine
de l’agglomération lilloise entre 1987 et 1998 , alors qu’elle
s’est pratiquement stabilisée dans l ’hypercentre (4).
La hausse de la consommation énergétique des transports routiers
entre 1990 et 2000 a été encore plus catastrophique dans le Nord-Pas-de-Calais
(+ 20%) que dans l’ensemble de la France (+ 15%). Comme tout un chacun
peut le constater en observant les norias de poids lourds qui circulent sur
notre territoire, cette hausse a été particulièrement forte
pour le transport de marchandises par camions et véhicules utilitaires
légers (+38%).
Malheureusement, certains de nos décideurs continuent à inciter
à l’augmentation de la mobilité et notamment à celle
du trafic poids lourds. Ils ont fait du Nord-Pas-de-Calais la deuxième
région logistique de France après l’ Ile de France. Si la
plate-forme multimodale de Dourges a été prévue pour transférer
une partie du transport marchandises sur le rail et la voie d’eau, la
Communauté Urbaine d’Arras, par contre, continue, malgré
l’opposition de Nord-Nature-Arras, à privilégier le transport
poids lourds avec trois plates formes logistiques que Gazeley implante actuellement
à Athies .
Corollaire de cette surconsommation d’ énergie : d’importantes émissions de dioxyde de carbone (CO2).
En 1996, le Professeur Vivier avait évalué les quantités de CO2 dégagées dans la région par les combustions dues aux activités humaines (chauffages, transports, industries…) à environ 30 millions de tonnes (5), non compris le gaz carbonique rejeté par la respiration . Comparant ces chiffres à ceux de la production d’ oxygène émise par nos très insuffisants espaces boisés, il avait souligné le déséquilibre du bilan gaz carbonique / oxygène dans le Nord-Pas-de-Calais et, par suite, la contribution de notre région à l’effet de serre. Il aurait fallu 18000 km2 de forêts pour équilibrer ce bilan . Nous n’en avions que 800.
Où en est-on aujourd’hui ?
Le Conseil Régional et l’ ADEME ont apporté récemment un soutien financier aux entreprises et aux collectivités qui font un effort de maîtrise de l’énergie et, par conséquent, de réduction des pollutions qui lui sont liées. Entre 2000 et 2002, ces efforts ont permis d’ « économiser » 41000 tep et d’ éviter l’émission de 135000 tonnes de CO2, mais dans un contexte de croissance, ces opérations ponctuelles sont d’une portée bien modeste par rapport au bilan régional global .
En
effet, les émissions régionales de gaz carbonique dues aux activités
humaines ont augmenté de 8, 5 % entre 1990 et 2001 et se sont élevées
à 35, 4 millions de tonnes en 2001 ( 2).
L’ industrie est responsable de plus de la moitié de ces émissions.
Contribution respective des principaux secteurs émetteurs de CO2 en 2001:
Sidérurgie | 32,4% |
Autres industries | 19,8% |
Transports | 24,5% |
Résidentiel - tertiaire | 22,1% |
L’ augmentation des émissions a été variable selon
les secteurs.
Elles ont progressé de 7, 8% dans le résidentiel – tertiaire.
Sans doute dans le secteur résidentiel, le développement des projets
de bâtiments à Haute Qualité Environnementale soutenus par
le Conseil Régional et l’ ADEME laisse –t-il entrevoir des
possibilités appréciables d’économies d’énergie
et de maîtrise des pollutions, tant dans les constructions neuves que
dans la réhabilitation de l’ancien. Mais il y a beaucoup à
faire, et il faut faire vite.
L’évolution la plus désastreuse concerne une augmentation
de 28% des émissions de CO2 dans les transports . Aussi le lancement
de la procédure de réalisation de l’autoroute A 24 et l’absence
de mesures contraignantes concernant les transports routiers dans le «
plan climat » sont-ils particulièrement inquiétants…
Certes, les surfaces boisées ont augmenté dans la région,
mais seulement de 5000 hectares en dix ans. Le Nord-Pas-de-Calais continue à
contribuer à l’effet de serre. Comme auparavant. Plus qu’auparavant.
Seules l’utilisation généralisée du solaire, énergie renouvelable et non polluante, des économies d’énergie dans divers domaines et des mesures vigoureuses en vue d’une décroissance dans les gros secteurs à problèmes comme l’industrie et les transports pourront freiner efficacement note contribution à la course vers la catastrophe climatique.
(1) La consommation d’ énergie finale concerne l’
utilisation de l’ énergie chez le consommateur final ( entreprises,
particuliers…). Tep = tonne équivalent pétrole
(2) Source : Norener 2003 (Conseil Régional Nord-Pas-de-Calais), citée
par l’ IFEN « L’environnement Nord-Pas-de-Calais » 2004
(3) Source : « L’environnement Nord-Pas-de-Calais », IFEN,
2004
(4) Source : estimations Ademe Nord-Pas-de-Calais, Conseil Régional,
Lille Métropole Communauté Urbaine, Cete, Inrets citées
par l’ IFEN
(5) Cf. « Le cycle oxygène / gaz carbonique » par E.Vivier,
revue de Nord-Nature, n° 85, 4ème trimestre 1996
Fédération Nord Nature, 23 rue Gosselet, 59000 LILLE - Tel 03.20.88.49.33 - mail : secretariat@nord-nature.org